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le priois de m’en aller querir un autre, parce que celuy-là ne m’avoit pas bien servie. L’enfant s’y encourut pensant bien faire, et me l’emmena incontinent. Je luy fis la mesme harangue que j’avois faicte à l’autre, et cestuy-cy, aussi prompt que le premier, m’ouvre l’autre bras que je luy presente, luy cachant celuy où j’avois desjà esté-saignée, et puis soudain il se retira.

Alors croyant avoir mis l’ordre qu’il falloit pour finir plus promptement, et plus asseurément mes jours, je fais tirer les rideaux, et serrer les fenestres, faignant que la clarté me faisoit mal. Mais incontinent je me desbande les deux bras, et oste les compresses, et tout ce qui pouvois empescher le sang de couler, m’estant voulu ouvrir les deux bras pour mourir tant plustost, et de peur aussi que s’il n’y en eust eu qu’un, le sang peut-estre se fut arresté de soy-mesme, comme il advient quelquesfois en semblables occasions. La premiere chose qui me vint devant les yeux estant en cest estat, fut le desplaisir qu’Arimant auroit de ceste nouvelle. Et parce que je creus que ce luy seroit un grand soulagement de scavoir que je mourrois en l’aymant, je pris promptement mon mouchoir, et l’estendant sur le lict, je trempay le doigt dans mon sang, et j’escrivis, fust bien ou mal, ces trois paroles : TIENNE JE MEURS, ARIMANT, qui fut tout ce que je pus faire, car incontinent les