Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/645

Cette page n’a pas encore été corrigée

de ces nopces durerent plusieurs jours, le lendemain, et tant que l’assemblée continua, il ne perdit une seule occasion de me tesmoigner la verité de ses paroles, desquelles en fin, je fus persuadée de le croire, et pour luy donner quelque satisfaction, luy permettre de croire que je l’aimois. Il est vray que j’attendis le dernier jour à luy faire cette declaration, de peur que si je l’eusse faicte plustost, il n’eust voulu pretendre à quelque plus grande faveur, et que si je l’eusse retardée d’avantage, je n’eusse plus le moyen de la luy dire, car en toute façon je ne le voulois laisser sans quelque asseurance de ma bonne volonté, presque pour arres de la sienne.

Depuis ce temps, nous demeurasmes sans nous veoir fort long-temps, sinon dans les temples et aux lieux publics, dequoy je confesse que j’avois de la peine, parce que je commençois de l’aimer, considerant mesme le soing qu’il avoit de ne perdre une seule commodité de me veoir. Et avec combien de discretion il les prenoit pour ne faire soupçonner son dessein à personne ! Il venoit fort souvent la nuict avec quantité d’instrumens faire la musique à mes fenestres, et parce qu’il avoit la voix fort bonne, je me souviens qu’il chantoit au commencement ces vers, sur la contraincte que je luy faisois de taire, et de cacher son affection :


Stances

Qu’il mourra plustost, qu’il ne dira son amour.

I

Doncques la mort sans plus descouvrira mon dueil
Et quand