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luy portois. Et quoy que mes paroles ne fussent pas peut-estre receues d’abord, comme venant d’amour, mais de civilité, si est-ce que depuis, elles faciliterent beaucoup la recherche que je luy fis, et furent cause de luy faire plustost croire ce que je desirois de luy persuader. J’ay bien opinion que de son costé elle n’avoit aucune pensée qui tendist à ce que je desirois, et toutesfois elle ne laissoit pas d’avoir plus agreable de parler à moy qu’à Periandre, ny à tout autre qui l’allast visiter, luy semblant que ceste affection qui me lioit à elle l’obligeoit pour le moins de se fier davantage en moy. Et si je n’eus autre cognoissance de sa bonne volonté que celle-cy, je puis dire avec vérité qu’il y avoit fort peu de choses qu’elle ne me communiquast, pour particulieres et importantes qu’elles luy fussent.

Et de faict, une lune presque depuis la première fois que je l’avois veue, et que desja la familiarité estoit grande entre nous, elle m’advertit que suivant leur coustume, elle et toutes ses compagnes, sur le soir se devoient aller promener en l’isle de l’Athénée, dans un grand jardin qui est sur le confluent du Rhosne et de l’Arar, lieu fort plaisant, tant pour les diverses et longues allées, que pour les grosses touffes d’arbres qui y sont. Je n’avois garde de faillir à cette assignation, tant parce que je n’avois autre exercice, ny autre dessein que d’autant que je pensay que ce seroit luy