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en repos, car je vous asseure que j’en ay tant que j’ay de quoy vous aimer plus long-temps que je ne vivray. – Mais, mon serviteur, puis que vous avez tant d’amour pour moy, dit Alexis, encore me semble-t’il que vous devriez desirer que j’en eusse autant pour vous, afin que cette amour ne fust point boiteuse.

– Vous dites fort bien, reprit Hylas, et c’est en quoy je suis bien empesché. Si vous me dites ce qu’il faut faire, vous verrez que je le désire pour le moins autant que je vous aime. – Je ne doute point, adjousta Alexis, de cette bonne volonté, mais puis qu’il est ainsi, il faut que vous en cherchiez les moyens. J’ay tousjours ouy dire que ce qui donne le plus d’amour, c’est la cognoissance de la chose aimable. Comment voulez-vous que je vous aime si je ne vous cognois point, ou pour le moins, si je ne sçay de vous que fort peu ? Le thresor caché ne sert à rien pour le faire estimer, vos actions sans doute vous pourroient rendre estimable, si elles estoient sceues ; c’est pourquoy il me semble que si vous desirez que je vous aime, vous devez estre curieux de me faire scavoir vostre vie, et maintenant que le temps est si propre et que vous aurez une si belle audience, vous ne devez pas en perdre l’occasion. – Et quoy, ma maistresse, dit Hylas, tout ce long discours que vous avez faict, n’a-ce esté que pour ce subject ? Il ne falloit que me faire signe que vous le vouliez, vous eussiez veu