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loger dans celle de Lycidas, ce fut luy qui, laissant cette troupe, se mit devant pour en porter les nouvelles, cependant qu’au petit pas ils s’en alioient chantans et discourans pour tromper la longueur du chemin.

Calidon qui avoit le souvenir si present de la cruelle response qu’Astrée luy avoit faicte, n’ayant plus la hardiesse de s’approcher d’elle, et toutesfois ne pouvant celer son desplaisir, ny son extreme affection, marchant quelques pas devant elle, ne se peut empescher de souspirer ces vers :



Sonnet

Que de l’aymer, c’est assez de récompense.

Pourquoy faut-il l’aymer, puis qu’elle est insensible ?
On n’a nul sentiment que pour s’armer le cœur
Contre un fidelle amant de nouvelle rigueur,
A tout autre pouvoir se rendant invincible ?

Pourquoy faut-il l’aymer, puis qu’il est impossible
De pouvoir par amour en estre le vainqueur,
Ny gaigner son esprit par peine ou par longueur,
Et qu’y perdre le temps, c’est l’espoir infaillible ?

Mais pourquoy ne l’aymer, si telle est sa beauté,
Que de ne l’aymer point, ce seroit lascheté,
Et que de la quitter n’est plus en ma puissance ?