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du costé où j’allois, pour me recognoistre.

Je ne sçaurois vous représenter, madame, avec quel contentement me receut le bon druide, quels furent les remerciemens qu’il me fit, quand il sceut le subject de mon voyage, et l’assistance que j’avois donnée à Madonte en une si grande nécessité ; car il me raconta d’avoir esté eslevé et nourry par son pere, et qu’en cette action je luy avois surpayé la peine et le soing qu’il avoit eu pour moy. Et parce qu’il vid que mes armes estoient teintes de sang, il me les fist oster, me visita de tous costez, et me trouvant quelques blessures, il print un si grand soing de moy, et y usa de telle diligence qu’en fort peu de temps je fus guery.

Mais d’autant que le plus grand soulagement que je peusse avoir en cet esloignement, et le meilleur remede pour me guerir estoit d’avoir des nouvelles de Madonte, je priay le bon druide d’envoyer quelqu’un de ces pescheurs où le roy demeuroit pour en apprendre. Le bon vieillard le fit, et ce pescheur s’en acquitta si bien, qu’à son retour il ne m’en apporta que trop pour mon contentement. L’une fut que Madonte s’en estoit allée en sa maison où elle avoit emmené Tersandre, tout blessé qu’il estoit, car ç’avoit esté luy qui, avant que moy, estoit entré tout seul au combat contre Leotaris et son frere. Je sceus encores que peu apres le depart de Madonte, le roy Torrismond avoit esté