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du combat, il suffit qu’il pleust à Dieu me donner la victoire de ces deux vaillans freres, vaincus plustost par l’innocence de Madonte, que par force ny vertu qui fust en moy, si ce n’est qu’ayant les armes en la main pour la vie et pour l’honneur de madame, tout l’univers ensemble ne me pouvoit resister. Je fus donc victorieux. Et lors que l’on le pensoit le moins, la verité fut declarée, la malice de Leriane descouverte, l’innocence de Madonte avérée, l’enfant recogneu pour estre à la niepce de Leriane ; et bref, toutes choses tellement esclaircies que la meschante Leriane fut jettée dans le feu qu’elle avoit fait preparer pour une autre, Madonte remise en liberté, et moy sorty de la plus grande peine qu’un homme sçauroit recevoir, par la cognoissance que j’eus qu’elle avoit esté accusée à tort, et que, si elle m’avoit outragé, elle n’avoit pas pour le moins manqué à son honneur et à sa pudicité. Ce qui me fut un si grand contentement que j’estimois toutes les peines que j’avois jamais souffertes en son service estre plus que recompensées.

Voyant donc toutes choses asseurées pour elle, et me semblant n’estre pas à propos de me faire cognoistre, que je ne sceusse un peu mieux, si elle aimoit Tersandre, ou si tout ce que j’en avois veu n’estoit point un artifice de Leriane, je m’en vins pres de son eschaffaut pour scavoir si elle se vouloit servir de moy en quelqu’autre occasion.