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quand en toute autre occasion je n’aurois point de courage, j’en prendrais pour celle-cy, non seulement contre toy, mais si, comme tu dis, il se faut cacher pour les mauvaises actions, je ne sçay où tu pourrois trouver un lieu assez retiré pour toy qui soustiens une chose si fausse et tant indigne de l’ordre de chevalerie que l’on t’a donné, puis que tu blasmes les dames que tout chevalier est obligé de maintenir, de servir et de deffendre. – Eh ! mon amy, respondit Argantée en se mocquant, et depuis quand, laissant l’estat de chevalier, es-tu devenu harangueur sur les grands chemins ? – C’est avec celle-cy, dit-il, luy monstrant son espée, que j’ay accoustumé,de haranguer. Si tu as le courage, tu verras si je ne sçay pas mieux faire que tu ne sçais bien dire.

A ce mot, il s’avance l’espée haute, et l’estranger le va rencontrer couvert de son escu, et plein d’un si grand despit pour les reproches qu’il luy avoit faites, qu’il sembloit que le feu luy sortoit des yeux ; et là ils commencerent l’un des plus furieux combats qui se peut voir entre deux chevaliers. A peine s’estoient-ils donnez les premiers coups que toute la troupe qu’ils avoient ouy venir, arriva sur le mesme lieu, et parce que le combat se faisoit au milieu du chemin, et que tous recogneurent Argantée, ils s’arresterent pour voir quelle en seroit l’issue.

Galathée qui estoit