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me cognoissois tu parlerois d’une autre sorte. Mais puis que cela est, ou monte à cheval, ou mets la main aux armes comme tu es, et je te feray cognoistre ta folie et ta temerité. – II ne faut point, dit l’estranger, perdre le temps et pour ce, tout à pied que nous sommes, nous aurons bien tost vuidé nostre different, et je m’asseure que tu avoueras que je te cognois mieux que tu ne me cognois pas. A ce mot il se jette dans le grand chemin, où ayant donné son gesse à son escuyer, et pris son escu, il mit l’espée en la main, et l’attendit d’une façon si asseurée, qu’Argantée jugea bien qu’il devoit estre gentil chevalier.

Lors qu’ils estoient prests à commencer leur combat, ils ouyrent un grand bruit de chevaux et de chariots, qui venoient de Marcilly droict vers eux. Cela convia Damon de dire qu’il luy sembloit plus à propos de se rejetter dans le bois, et laisser passer cette troupe de peur d’estre interrompus. Mais Argantée qui se doutoit bien que c’estoit Galathée, ou Amasis, et qui estoit bien aise de faire ostentation de sa force et de son adresse : Non, non, dit-il, chevalier, il ne faut jamais se cacher que pour mal faire. En cette contrée, l’on n’est point empesché de faire les actions bonnes et genereuses ; et pour ce ne perdons point le temps comme tu dis, si ce n’est que le cœur te manque à soustenir et demesler ta querelle. – Ma querelle, dit-il, est si juste que,