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de celuy de maistresse que, non pas la gageure, ny la feinte, mais vos perfections et mon affection, vous ont si justement acquis sur mon ame. – Je vous ay desja dit, reprit la bergere, que je trouve bon que vous parliez de ceste sorte jusques à ce que ceste feinte soit achevée. Mais en fin, quand voulez-vous que nous sortions de ceste affaire tous trois, car il me semble qu’il a tantost assez continué et que le terme des trois lunes est presque doublé ? – Quant à moy, dit Silvandre, je n’avanceray ny ne reculeray le temps qu’il vous plaira, estant tres asseuré que quoy qu’il en arrive, je ne changeray point de condition. – Ne parlons jamais, dit Diane, de l’avenir, sinon avec doute, puis qu’il n’y a que les dieux qui le puissent sçavoir. Et dites moy, Silvandre, voulez-vous que nous employons ceste apresdisnée à terminer ce différent ? Il me semble que la commodité y est bonne, et l’assistance telle que nous la sçaurions desirer.

Silvandre qui craignoit, quelque mine qu’il fist, l’humeur de Diane, et qui sçavoit bien qu’il ne falloit plus esperer de vivre avec elle de cette sorte quand cette feinte seroit ostée, demeura un peu surpris, et ne respondit pas si tost à la bergere, qu’elle ne cogneust bien la peine en laquelle il estoit, et cela ne faisoit que l’asseurer davantage de la verité de son affection. Et toutesfois, feignant comme de coustume : Vous ne respondez point, berger, dit-elle, voulez-vous