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qu’il aille, et mesme venant vers des personnes qui l’estiment tant que nous faisons. – Je voudrois, respondit le berger, que ceste estime fust changée en amour. – Quelquefois, adjousta la bergere, nous desirons des choses au dommage d’autruy, et qui ne nous sont point avantageuses. – Je croy, adjousta Calidon, ce que vous dites pouvoir advenir en toute autre occasion qu’en celle qui se presente, car que mon desir soit à vostre desavantage, permettez-moy de dire, belle bergere que vous ne le devez point penser, puis que le sage Phocion le juge d’autre sorte, Phocion qui, en prudence et en sagesse, est tenu pour l’oracle de tous les plus sages bergers de cette contrée et qui m’a faict l’honneur de m’accorder la requeste que je luy en ay fait faire par Thamire. De dire aussi que ce que je souhaite soit à mon dommage, tant s’en faut qu’il puisse estre ainsi, qu’au contraire je n’auray jamais bien ny contentement que ce bon-heur ne m’arrive.

– Je ne sçay, répliqua Astrée, avec un visage un peu plus rude, quelle peut estre la requeste dont vous parlez, mais si sçay bien que si c’est chose qui me touche, il n’y a personne qui vous doive ny puisse promettre rien contre ma volonté, puis mesme que mon pere, et ma mere, pour mon manieur, m’ont esté ostez. Et quant à ce que vous dites de Phocion, vous ne sçauriez me