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dis vray, je vous laisse tous deux, pour assister Astrée en ce grand combat que je vois luy estre preparé par cet ennemy qui l’approche.

Et sans attendre leur response, s’alla joindre aux costez d’Astrée qui, jugeant bien à quelle occasion elle y venoit la prit par la main, et passant l’autre bras sur le sien, la tenoit le plus pres d’elle qu’elle pouvoit, pour donner sujet à Calidon de ne la point accoster ; mais ce jeune berger, qui estoit veritablement touché de la beauté d’Astrée, ne se peut empescher de s’y en venir. Et parce que la recherche qu’il luy faisoit, estoit au sceu de Phocion, qui l’avoit pour tres-agreable, et par l’avis de Thamire qui la luy avoit conseillé, il luy sembla qu’il n’importoit point de parler à la bergere en la presence de quelqu’autre ; qu’au contraire, peut-estre Phillis luy ayderoit à luy declarer son affection, puis qu’elle devoit croire que c’estoit l’avantage de sa compagne, Phocion en ayant desja fait le mesme jugement, luy qui estoit tenu pour le plus sage pasteur de son temps, et oncle de la bergere, et qui, depuis la mort de ses pere et mere, en avoit tousjours eu le mesme soing que si elle eust esté sa fille.

S’approchant donc avec cette asseurance de cette belle bergere : Ne seray-je point importun, luy dit-il, apres l’avoir salué, si sans estre appellé, je viens estre le troisiesme de vostre conseil ? – Jamais Calidon, respondit Astrée, ne sçauroit avoir ce nom en quelque lieu