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fort. – Ignorant berger, reprit Hylas, n’as-tu pas ouy que le sage Adamas a dict que l’occasion pour laquelle les belles personnes estoient aimées de tant de gens, estoit parce que leur beauté participoit avec quelque conformité à celle de toutes les autres planettes et intelligences ? – Je l’ay fort bien ouy, respondit Silvandre, mais en quoy est-ce que cela t’est advantageux ? – En ce que, repliqua Hylas, si j’ayme tant de diverses beautez, il faut que j’aye de la conformité avec toutes, et ainsi je me puis dire plus beau que toy, qui n’en regardes qu’une seule. – Je pense, reprit Silvandre en sousriant, que si ta raison est bonne, tu n’es pas seulement plus-beau que moy, mais plus que tous ceux de ceste contrée quand ils seroient joints tous ensemble. Mais il ne faut pas entendre le discours du sage Adamas de ceste sorte. Au contraire, si tu te souviens de ce qu’il a respondu à Daphnide, tu cognoistras que c’est signe d’un grand defaut en toy, qui as ce portraict de ton intelligence et de ta planette, si mal-fait, qu’il n’y a pas une de ces belles qui ne desdaigne de voir en toy une si grande imperfection d’une chose si parfaite.

Chacun se mit fort à rire, et Hylas eust bien repliqué quelque chose pour sa deffence, n’eust esté qu’on se leva de table, estant desja assez tard. Et parce qu’Astrée ayoit fort bonne memoire du conseil que Leonide luy avoit donné, de