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vous ne vous entre-aimez ? s’il est vray que la sympathie soit cause de l’amour. – A cela, dit-elle incontinent je te le diray sans que tu mettes en peine personne : la sympathie peut faire effect lors qu’il n’y a point une plus grande force qui s’y oppose. Et celle qui peut estre entre Hylas et moy pourroit avoir la force de faire naistre cet amour, si ce n’estoit que t’ayant cogneu si peu digne d’estre aimé, tu m’as faict concevoir une si mauvaise opinion de tous les autres bergers que je ne sçay quand je la perdray jamais. – Je pense, dit Corilas froidement, que vous avez raison, bergere, car depuis que je vous espreuvay telle que vous scavez, je n’ay peu me figurer que celles qui estoient vestues comme vous, ne cachassent soubs les mesmes habits les mesmes imperfections. – Ah ! s’escrierent tous les bergers, Corilas, c’est trop, de blasmer toutes les autres !

– Non, dit Corilas, ce n’est pas mon intention de les blasmer. Je ne dis pas qu’elles ayent ces imperfections, mais seulement je dis que je ne me suis peu figurer qu’elles ne les eussent, et en cela je ne fais tort qu’à moy-mesme, qui n’ay le jugement de sçavoir recognoistre la verité. Mais de tout ce mal, j’accuse cette trompeuse, laquelle toutesfois ne se peut guere glorifier de cette victoire, puis qu’elle luy a cousté si cher qu’elle advoue elle-mesme.

Daphnide et Alcidon escoutoient avec