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vous y aider et servyr en tout ce que je pourray.

Silvandre ne se pouvoit presque empescher de rire de l’ouyr parler de ceste sorte, et pour luy en asseurer encores plus l’opinion qu’elle en avoit conceue, la supplia de n’en vouloir point faire de semblant, de peur que quelqu’autre ne s’en prist garde et sur tout n’en rien dire à Madonte, parce qu’elle s’en sentiroit offencée, et cela pourroit estre cause de ruiner tout son dessein, qu’il la remercioit grandement des offres qu’elle luy faisoit, lesquelles il ne refusoit point, mais qu’il ne vouloit accepter encores pour plusieurs raisons que bien tost il luy feroit sçavoir. Silvandre pensoit ainsi faire le fin, mais Laonice qui feignoit de le croire, commencoit d’ourdir par là la meschanceté qu’elle luy vouloit faire, et que depuis elle luy vendit si chèrement.

Cependant Paris et Diane estoient entrez bien avant en propos, car ce jeune homme brusloit d’une si violente amour pour cette bergère, qu’il ne pouvoit vivre avec aucun repos que lors qu’il estoit auprès d’elle. Et il est certain que si cette bergère eust eu dessein, d’aymer quelque chose, elle eust peu s’en embrouiller ; mais depuis la mort de Filandre, elle ne vouloit que l’amour prist place parmy ses affections, luy semblant que rien n’estoit digne d’estre mis au lieu où un berger si parfaict que Filandre avoit esté si long-temps. Que si elle ayma depuis Silvandre, ce ne fut pas par dessein mais