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plus joyeux que de coutusme, dequoy Adamas s’estant pris garde, apres luy avoir rendu son salut, il luy dit : Que le bon visage qu’il luy voyoit à ce matin, luy estoit un presage que ceste journée luy seroit heureuse. - Dieu vueille, mon pere, respondit Alexis, que vous en receviez du contentement ; car quant à moy, je n’en espere point que par ma mort. Que si vous me voyez plus joyeuse que de coustume, c’est que tous les jours que je paracheve, il me semble avoir approché d’autant la fin du supplice que la fortune m’a ordonné, imitant en cela ceux qui sont contraints de faire un long et penible, voyage, et qui, tous les soirs, quand ils sont arrivez à la fin d’une journee, content la quantité des lieues qu’ils ont faictes, leur semblant que c’est autant de diminué de la peine qu’ils doivent avoir.

Le druide luy respondit froidement : Mon enfant, ceux qui vivent sans esperance d’allegement en leurs miseres offensent non seulement la providence de Tautates, mais aussi la prudence de ceux qui ont pris le soing de leur conduitte. Et en cela j’aurois occasion de me plaindre doublement de vous : d’un costé, pour le tiltre de druide que j’ay en ceste contrée, à cause de l’offense que vous faites à Dieu, et de l’autre, comme Adamas, de celle que vous me faictes, puis que l’Oracle vous a remis entre mes mains. - Mon pere, respondit Alexis, je serois tres-marry d’offencer nostre