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compagnie demeuroit sans dire mot, et comme attendant s’ils vouloient recommencer, qui fut cause que plusieurs s’apperceurent non seulement de l’affection avec laquelle Paris entretenoit Diane, mais aussi de la passion avec laquelle Silvandre supportoit leurs longs discours. Ce que considerant, Hylas, et luy semblant d’avoir quelque avantage par dessus luy : C’est assez chanter, luy dit-il, Silvandre, entrons un peu en raison, et me dis par ta foy, si tu es encore de la mesme opinion que tu soulois estre ? – Je n’ay pas accoustumé, dit Silvandre, de beaucoup changer ; mais de quelle opinion veux-tu parler ? – Es-tu encor, reprit Hylas, dans le cœur de Diane ? et elle, est-elle encores dans le tien ? – Pourquoy, respondit Silvandre, me fais-tu cette demande ? – Parce, dit-il, que je veux tout à cette heure te faire advouer le contraire. – Il me semble, Hylas, respondit le berger, que tu as longuement dormy pour te resveiller tant hors de propos.

Chacun se mit à rire et de la demande et de la responce, qui fut cause que Phillis prit occasion d’interrompre les discours de Paris et de Diane, appellant sa compagne pour ouyr ceste gracieuse dispute. Et en ce mesme temps Hylas respondit : Berger, berger, je ne m’esveille pas tant hors de propos que tu penserois bien, puis que de mettre hors d’erreur une personne, c’est une œuvre qui n’est jamais hors de saison. Et respons-moy seulement, si tu es encore ainsi que je