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luy disoit, et pour mieux dissimuler, faisoit semblant de ne pouvoir pas bien remarquer le lieu qu’elle luy vouloit monstrer et que toutesfois elle sçavoit mieux que la bergere mesme qui le luy vouloit enseigner. Et au contraire la belle Astrée, la tirant un peu vers elle, et advançant la main pour luy faire porter la veue droicte au lieu où estoit le temple : Voyez-vous, madame, luy disoit-elle, ce bois qui touche presque le bord de la riviere ? Portez vostre veue un peu plus à main gauche, vous verrez un petit pré qui semble plus verd que les autres qui sont plus en là : c’est parce que l’herbe n’y est point foulée, et que le bestail n’y est jamais conduit, d’autant que dés long-temps il est dédié à quelque divinité aussi bien que cette touffe d’arbre qui le touche. Or ce petit pré sacré semble avoir esté conservé de cette sorte comme l’entrée de ce temple artificieux qui est dans ces arbres que vous voyez. – II me semble, respondit froidement Alexis, que je commence de remarquer ce que vous dites, et mesme que je voy un arbre beaucoup plus eslevé que tous les autres. – II est vray, dit incontinent Astrée, c’est celuy sur lequel est appuyé le temple et qui, pour estre le plus signalé, a eu le bon-heur de porter cette année le Guy sacré pour lequel l’on doit faire le sacrifice du remerciement. Si j’avois l’esprit de vous pouvoir redire les choses rares qui y sont, et l’artifice avec