Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/373

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’Euric estant mort, meure aussi en mesme temps ceste feinte recherche, et que je l’enterre dans le mesme tombeau ! Et si j’eusse fait autrement, n’eussé-je pas fait paroistre que j’y avois quelqu’autre dessein ?

Mais il faloit, dit-elle, me demander pardon, avant que retourner à vivre comme de coustume avec moy. - Bon Dieu ! est-il possible que celle qui m’a promis des paiemens et des recompenses pour faire ce qu’elle m’a commandé, vueille qu’au lieu du loyer, je luy demande des pardons ? Et de quoy, madame, vous plaist-il que je le vous demande ? - De ce que vous avez servy, direz-vous, Clarinte. - Mais vous me l’avez commandé, et commandez encore, avec promesse de rescompense. -Mais pourquoy, me direz-vous, avez-vous si long temps continué ? - Mais pourquoy, madame, n’eussé-je pas continué si long temps, puis que j’attendois tousjours vos commandemens ? Ne pourroit-on pas faire cette mesme reproche au forçat qui est attaché dans la galere, et de qui la liberté despend de la volonté d’autruy ? Et si l’on luy demandoit : Pourquoi as-tu demeuré si long-temps en cette captivité ? n’auroit-il pas raison de dire : Mais pourquoy m’y avez-vous laissé si long-temps ?

Vous dites que vous sçaviez bien que j’avois aimé Clarinte et taschez de r’apporter quelque particularité. Et si cela est, et que cette affection vous despleust, pourquoy me commandiez-vous de la servir ?