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que toutes les choses qui se pouvoient imaginer, respondit qu’elle l’estoit encore plus que la calomnie, nous vouloit faire entendre qu’il n’y a rien qui perce et l’ame et le cœur avec une plus profonde blesseure. Et veritablement je l’ai ressenty plusieurs fois, puisqu’il plaist ainsi à ma fortune et à cette belle. Mais il y a long temps que l’outrage ne m’en a esté si cuisant qu’il l’est à ce coup, tant pour cognoistre qu’elle continue cette mauvaise opinion qu’elle a conceue de moy, que pour me voir blasmer devant une personne telle que le sage Adamas. Et parce que je sçay bien qu’un blasme qui n’est point verifié tient lieu de verité, et que j’aimerois mieux la mort que la voir vivre avec cette opinion, je vous supplie, madame, de me permettre que je puisse dire en ma deffence ce que chascun est obligé pour la verité.

Et parce que le druide luy respondit qu’il estoit raisonnable, et que mesme c’estoit commencer d’employer le temps ainsi qu’il sembloit que l’oracle l’avoit ordonné, il continua de cette sorte :

Cette belle dame a pris la peine de vous raconter, mon pere, assez au long la suitte de ma miserable fortune, et j’avoue qu’elle a dit la verité