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mieux la sincerité de l’affection qu’Alcidon vous porte, ou que, s’il est autrement, la fausseté et la dissimulation en soit tant plus tôt et tant plus aisément descouverte. Car il n’y a rien qui fasse mieux paroistre la blancheur qu’en luy opposant quelque chose de bien noir.

Je conclus donc : que ce soit d’une sorte ou de l’autre que l’oracle doive estre entendu, vous devez demeurer quelque temps en ceste contrée, tant pour voir si l’enchantement cessera, que pour avoir le loisir de recognoistre la verité de l’affection d’Alcidon, auquel cependant je donne toute sorte de bonne esperance, car il faut croire que les dieux sont comme les mires ; qui ne s’amusent point à donner des remedes aux maladies incurables. Je veux dire que, s’ils eussent recogneu que la colere de Daphnide eust deu estre perpetuelle, ils ne luy eussent pas proposé ce remede.

Ainsi finit son discours le sage druide. Et parce que Daphnide faisoit paroistre de se vouloir lever, Adamas en fit de mesme. Mais Alcidon le retint, qui le supplia de faire r’asseoir Daphnide, afin qu’il peust, en sa presence, luy dire quelque chose qui luy estoit de tres-grande importance. Et lors, quoyque presque par force, le druide l’ayant arrestée, Alcidon reprit la parole de cette sorte :

Celuy, mon pere, qui, pour monstrer que son espée estoit plus aigue