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elle les remit aisément ensemble et fit lire le remerciement qu’il faisoit pour quelque extreme faveur receue.

Amintor, se remettant en mémoire le temps qu’il escrivit cette lettre, et par quel artifice on la luy avoit tirée des mains : II faut advouer, dit-il, madame, qu’Alcyre est le plus fin, rusé et malicieux homme qui fut jamais. Il est vrai que j’ay escrit cette lettre, que je la luy ay donnée, mais pour coppie seulement, et sans estre cachettée.

Et, continuant son discours, luy raconta tout ce qui s’estoit veritablement passé en cet affaire.

- Mais, continua-t’il, je viens de me souvenir d’une chose qui m’est demeurée entre les mains, qui confirmera ce que vous avez dit, que Dieu n’abandonne jamais l’innocence, et qui vous monstrera la verité de ce que je vous dis. Ce sera donc avec vostre permission que j’envoyeray querir une layette où j’ay mis le papier qu’Alcyre brouilloit, quand il feignoit de ne pouvoir venir à bout de satisfaire aux commandemens du roy, par lequel vous verrez que ce que j’ay escrit n’a esté que pour le soulager, ainsi que je disois.

La volonté que Clarinte avoit de bien verifier ceste malice luy fit trouver à propos de voir ce papier, lequel, ayant esté apporté incontinent apres, tesmoigna clairement la verité de tout ce qu’Amintor avoit dit, qui donna un tel contentement à Clarinte (car elle recognut fort bien la lettre d’Alcyre) que, tendant la main au chevalier, et se laissant