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Belles fleurs, je vous croy
Moins heureuses que moy.
Puis soudain, au rebours, repensant en moy-mesme
Que je n’ay point de mal, sinon parce que j’aime :
Je te dis, ô bouquet ! mille fois plus heureux,
N’estant point amoureux.

Amintor, ayant leu ces premiers vers, s’arresta pour considerer la lettre, et, apres y avoir quelque temps songé : Et bien ! luy dit Clarinte, qu’en pensez-vous ? - Jusques icy, respondit-il, je n’y voy rien qui me fasse changer d’opinion, sinon l’escriture qui, veritablement, n’est pas de celuy que je pensois. Mais, peut-estre, l’a-t’il fait expres, pour en oster la cognoissance à ceux qui les verroient. - Je cognois bien, adjousta Clarinte, que vous vous trompez. Mais continuez de lire les autres, et peut-estre vous en donneront-ils plus de cognoissance, ou vous mettront entierement hors de l’opinion où vous estes.

Lors Amintor continua de cette sorte :


Sonnet

sur le mesme sujet.

Amour cueillit ces fleurs où prend la belle Aurore
Ses roses, ses œillets et ses lys tour à tour ;
Qu’apres, ouvrant le ciel et les portes du jour,
En tombant de ses mains, tout l’Orient adore.