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où elle estoit venue pour parler à quelqu’un de nostre armée qu’elle cognoissoit. J’avoue qu’aussi tost que je la vis, je l’admiray, et qu’elle faillit dés lors de me couster la vie, parce que, la trefve se rompant cependant que je la considerois, je ne me donnay garde que je fus tout couvert de traicts et de flesches, que ceux de la muraille me tiroient, et que, comme elle portoit en ses habits le signe de la mort, car elle faisoit le deuil de son pere, sa veue me fut presque mortelle de ceste sorte. Mais je ne confesseray jamais que cela m’ait fait manquer à ce que je vous dois, et que vous me faites une extreme injure quand vous en parlez autrement. - Nous en croirons, dit Daphnide, ce qu’il vous plaira. Tant y a, Alcidon, que ceste fois que, par mon commandement, vous luy parlastes d’amour n’avoit pas esté la premiere, et qu’à ceste occasion l’accez vous en fut plus aisé.

Au commencement toutesfois, sçachant ce qui s’estoit passé entre nous, d’autant que le roy mesme le luy avoit raconté, elle ne laissa de rejetter bien fort ses paroles. Car il faut que vous sçachiez, mon pere, que le grand Euric, pensant s’avancer davantage en ses bonnes graces, luy faisoit entendre que toute la recherche qu’il me faisoit n’estoit que pour Alcidon, qu’il luy disoit estre passionnément amoureux de moy. Et parce que ce chevalier, desireux de