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de celle-cy, de sorte qu’encores qu’il m’ennuyast fort de voir Euric la caresser, toutefois elle ne me donnoit pas les grands soupcons que j’avois de l’autre, et cela fut cause que je me resolus de divertir l’esprit de ce prince premierement de celle-cy, et puis, avec plus de loisir, d’Adelonde ; et mesme que je voyois desjà qu’il s’y laissoit presque aller, et qu’encores qu’au commencement il feignit de la visiter, non point par amour, mais par honneur seulement, depuis, quelques jours il y alloit plus souvent que de coutume et se cachoit de moy le plus qu’il pouvoit. Je m’en apperceus assez tost, outre que les espies que je tenois secrettement aupres de ce prince m’en avertirent incontinent. Et cognoissant qu’il y falloit remedier et sans perdre temps, apres avoir cherché en moy-mesme ce que j’y pourrois faire, enfin je jetay l’œil sur Alcidon, me semblant que, s’il me vouloit seconder en cecy, mon dessein pourroit heureusement reussir. Et parce qu’il estoit necessaire de l’effectuer promptement, à la premiere occasion que je peus parler seule avec luy, je luy tins un tel langage :

J’ay demeuré quelque temps irresolue si je vous devois faire entendre une chose qui me travaille plus que je ne sçaurois vous representer, craignant que l’affection que vous me portez ne vous fasse recevoir mes paroles autrement que je ne desire. Et toutesfois, si vous considerez de quelle sorte j’