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des femmes, pensant que l’affection que le roy avoit fait paroistre en fust assurement la cause. Enfin, ma patience ne pouvant plus souffrir que je vesquisse en ceste incertitude, je luy envoyay celuy des miens qui, la premiere fois, luy avoit porté de mes lettres, et, en l’extremité de mon mal, je luy escrivis ce peu de mots :

Lettre D’Alcidon à DAphnide

J’ay bien, à ce coup, occasion de me plaindre de ma fortune, me voyant delaissé en mesme temps de mon maistre et de ma maistresse. (Je ne sçay, madame, s’il m’est encor permis de vous nommer ainsi.) Mais aussi me dois-je bien louer d’elle, qui, jugeant que c’est à tort que l’un et l’autre me traitte de cette sorte, ne me veut laisser plus long temps en vie, pour me faire souffrir cet injuste supplice plus longuement.

Or, voyez, sage Adamas, comme Amour se plaist quelquefois de blesser et de guerir ceux qui sont à luy presque en mesme temps ! Alizan, ayant esté envoyé en l’armée pour sçavoir de mes nouvelles et ayant appris que j’estois demeuré malade en Avignon, retourna en diligence vers sa maistresse, qui me le depescha tout aussi tost, et, de fortune, le mesme jour que je luy avois escrit. De sorte qu’à la mesme