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à quel propos vous me parlez d’Alcidon, ny quel est le hasard qu’il a couru, mais si sçay bien qu’il n’y a rien en moy qui merite, ny d’y arrester vos yeux, ny d’employer les belles paroles d’un si grand roy. – Eh quoi ! m’a-t’il dit, belle dame, pensez-vous qu’Alcidon soit party de mon armée sans mon congé, et sans me dire où il alloit ? Les ordonnances de la guerre sont trop rigoureuses contre ceux qui font autrement, et, de plus, asseurez-vous qu’il est trop jeune pour avoir une si bonne fortune et la pouvoir taire. – Je suis si peu guerriere, luy ay-je respondu, et l’age d’Alcidon m’importe si peu, que je ne me suis jamais enquise jusqu’ici, ni quelles sont les ordonnances de la guerre, ny le silence de celuy de qui vous parlez. – Et quoy ! m’a-t’il repliqué, vous pensez donc que je ne sçache pas qu’il vous a vue par deux fois : au commencement, chez un chevalier qui a charge des machines de guerre en mon armée, et puis chez vostre sœur, où vous l’avez tenu dans un cabinet autant qu’il a voulu demeurer ? Non, non, ma belle dame, il n’y a rien qu’il ne m’ayt raconté, et si particulierement que vous ne m’en scauriez rien dire davantage. – II faut, luy ay-je respondu, qu’Alcidon se fie beaucoup en vous, car je ne croy pas, seigneur, que cela soit des ordonnances de la guerre.

Et, en disant ces paroles, j’ay esté contrainte de me mettre la main sur