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mettre en ses mains) de s’acheminer avec partie de son armée du costé où Daphnide demeuroit. Ayant sceu ceste resolution par le roy, je luy dis, transporté de joye : A ce coup, seigneur, je recevray la faveur que vous me voulustes faire, quand j’allay voir ma maistresse, car vous passerez à la porte de sa maison, – Je m’en resjouis, me respondit-il, car nous verrons si elle est si belle que vous la figurez, et si je parle à elle, je recognoistray bien tost si vous en devez esperer quelque chose.

Voilà donc le roy en chemin. Et, pour ne particulariser ce qui ne touche point au discours que j’ay à vous faire, je laisseray, sage Adamas, à ceux qui escriront ses faicts, ample subject des plus belles histoires, de raconter les exploicts de guerre qu’il fit en ce voyage, et diray seulement qu’estant à une lieue de la maison de Daphnide, le roy me dit qu’il vouloit la voir, et que, par honneur, il n’oseroit passer si pres d’elle et de sa mere, sans ceste demonstration de bien-vueillance envers le pere, qui l’avoit servy et le servoit encores si dignement.

Je luy respondis : J’ay grand peur, seigneur, qu’à ceste fois l’amour ne se mesle avec l’honneur. – Vous voicy, me dit-il en sousriant, en votre premiere folie. Ne croyez-vous pas ce que je vous ay juré, avant vous l’avoir promis ? Si je I’eusse fait, c’eust esté tromperie ; mais à ceste heure, ce seroit perfidie. Perdez ceste opinion, si vous ne me voulez offencer ; et,