Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée

bien, pour le moins pretendant, et recherchant une mesme chose. Et Dieu scait quelle est la force de l’ambition sur l’esprit des femmes, et mesme des femmes qui ont une ame genereuse !

Cependant que nous parlions de ceste affaire, on vint advertir le roy que ceux de la ville d’Arles avoient resolu de se remettre en ses mains, aux conditions qu’il leur avoit fait proposer, à sçavoir, de la conservation de leurs franchises et privileges, sans laquelle ils n’eussent jamais consenty à le recognoistre, tant les peuples et habitans de cette ville sont courageux et hardis. C’est, me dit alors le roy, me tirant un peu à part, pourquoy je vous ay demandé si vous aviez esté aussi heureux en amour que moy en guerre. Car ceste ville est le chef de cette province ; se donnant à moy comme elle fait, il faut croire que toutes les autres en feront bien-tost de mesme à son exemple. – Seigneur, luy respondis-je, c’est un fort bon presage pour moy, et si je viens à bout de mon dessein, je ne voudrois pas avoir changé ma prise à la vostre.

Le roi m’embrassa en sousriant, et puis me dit tout haut : Nous sçaurons une autre fois le reste de vos nouvelles. Cependant, je vay mettre ordre à contenter ceux de cette ville, pour convier les autres à faire comme elle. – C’est, luy dis-je, seigneur, le meilleur conseil que vous puissiez suivre ; car un grand roy, comme vous estes, doit s’efforcer de se sousmettre