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bien tenu ce que vous m’avez promis, que je serois bien lasche et recreu chevalier, si je n’en faisois de mesme. – Vous estes donc obligé, me dit-elle, suivant les conditions qui sont establies en ce lieu, de n’entreprendre, pour occasion que ce soit, ny pour quelque commodité qui se presente, ou qui vous soit donnée, chose quelconque contre l’honneur des dames qui sont icy. Au contraire, vous devez estre content des faveurs qu’elles voudront vous faire, sans que vous en puissiez rechercher ni demander de plus grandes. – Plustost, luy respondis-je, mon espée me soit mise dans le cœur, que je recoive jamais une pensée contraire à cette ordonnance. Tout chevalier d’honneur y est obligé par le nom seulement qu’il porte, et je cognois bien maintenant que c’est icy l’aventure de la parfaicte amour, puisque ce respect est l’une des principales ordonnances d’Amour. – J’ay bien tousjours pensé, respondit Delie, que vous ne contreviendriez jamais à ceste coustume, cognoissant assez la discretion et l’honnesteté d’Alcidon. Mais je me resjouys grandement que vous l’approuviez, comme vous faites paroistre, puisqu’elle n’est establie que pour vous.– Comment, dis-je, ceste coustume n’est establie que pour moy ? Et faut-il en faire pour retenir ma seule indiscretion ? A-t’on eu opinion que je sois plus outrecuidé que tous les autres chevaliers errans ? – Ce n’est pas cela, me dit-elle, mais n’est-il