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elle, en mettant une main sur le costé, n’avez-vous point devant vous un assez fier et courageux ennemy pour vous faire mettre la main aux armes ? – J’advoue, luy dis-je belle déesse, que vous estes un fier et tres-dangereux ennemy, pour une personne qui auroit un cœur. Mais certes, contre moy, vos armes seront bien vaines, qui m’en suis privé pour le donner à cette Daphnide qui le possede il y a si long temps. De sorte que s’il ne me revient autre profit de ma perte, j’auroy pour le moins celuy-cy, qu’elle me garantira de l’outrage qu’à ce coup je pourrois recevoir de vos yeux. – Et quoy ! me dit-elle, je n’ay donc point d’esperance de pouvoir gagner quelque chose en vous ? – Vous pouvez, luy respondis-je, esperer de gagner en moy tout ce qui est à moy. – Vous voulez dire, reprit-elle, toute autre chose, sinon vostre cœur. Et bien ! Alcidon, vous n’estes pas encore reduit à la bonne foy, mais avant que vous eschappiez de mes mains, je vous feray parler d’un autre langage. J’en ay bien veu d’autres, qui, au commencement, disoient comme vous, et qui toutesfois, avant que le combat fust achevé, trouvoient bien un cœur pour payer leur rançon, se donnant volontairement pour vaincus. – Ceux-là, respondis-je, ou ne l’avoient que presté, ou, s’ils l’avoient donné, le desroboient pour le vous redonner. Mais cela, ne peut advenir en moy, qui ne l’ay