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cette volonté, puis qu’ils nous ont commandé d’y venir. – J’obeiray, dit Daphnide, tant qu’il me sera possible, à la volonte des dieux, mais pour me faire faire cette preuve, il faudra bien qu’ils me le commandent plus clairement et plus absolument. – Voilà que c’est, repliqua Alcidon, que d’une foible amitié. – J’advoue, dit-elle, que si cela tesmoigne la foiblesse de la mienne, vous aurez tousjours plus d’occasion de la croire telle ; car je ne sçaurois me resoudre à estre sacrifiée pour le public. Outre, que n’y ayant rien que j’ayme maintenant, pourquoy serois-je tant hors de moy, que de me vouloir priver de vie pour quelqu’un, puis qu’encor que j’aymasse plus que je ne sçaurois dire, je ne le voudrois pas faire ? Et que j’estimerois celuy hors du sens qui seroit de contraire opinion, n’y ayant pas grande apparence que celuy qui aime bien, vueille se priver de la veue, de la presence, voire de la jouyssance de ce qu’il aime, pour mettre fin à un enchantement.

Mais, mon pere, dit-elle, se tournant vers Adamas, je vois bien qu’Alcidon me contraint de vous descouvrir le subject qui nous ameine icy. S’il vous plaist, nous nous retirerons à part ; je le feray tres-volontiers, à condition que vous nous donnerez le conseil que vous jugerez le meilleur. – Madame, dit le druide, je voudrois vous pouvoir aussi bien conseiller, que d’affection je