Page:Urfé - L’Astrée, Troisième partie, 1631.djvu/1185

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plaira me le commander, pour vous descharger de cette importunité, je m’offre à le luy faire entendre, et à luy en deduire les raisons de telle sorte, que jamais plus il n’y pensera.

Ainsi finit Childeric, qui fut escouté si attentivement de son pere, qu’il pensa d’avoir à l’heure mesme la commission d’en parler à Andrimarte ; mais le sage roy, qui dés long-temps avoit bien pris garde que ce jeune prince estoit amoureux de Silviane, et que toutes ces considerations ne luy estoient dites, que pour l’envie qu’il avoit de la posseder tout seul, luy ayant donné audience telle qu’il voulut, et voyant qu’il attendoit sa response, apres y avoir quelque temps pensé, reprit ainsi la parole avec un visage severe, et luy tesmoignant assez par là le peu de satisfaction qu’il avoit receu de sa harangue :

Je suis tres-marry de recognoistre en vous les choses que je voudrois le moins y estre, et particulierement deux, qui seront la cause de vostre perte, si avec prudence vous ne vous en despouillez bien-tost. La premiere, cette humeur effeminée qui vous emporte à une vie dissolue, et à la recherche des delices et de l’amour, car si par les contraires l’on fait de contraires effects, et si les Gaules que je possede ont esté ravies d’entre les mains de ces vaillans et puissans Romains,