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ce qui toucha encore plus vivement le cœur de Childeric, qui se resolut, à quelque prix que ce fust, de rompre cette amour qui luy estoit tant à contre-cœur. Et parce qu’il cogneut bien qu’il avoit donné trop de cognoissance de sa passion, et que le roy n’en estoit pas content, il se contraignit le plus qu’il luy fut possible, afin de faire croire que tout ce qu’il en avoit faict, avoit seulement esté pour le suject que Merovée avoit dict ; mais il n’y en eut guere en la compagnie qui ne cogneust bien cest artifice, et mesme Andrimarte qui sçavoit l’affection qu’il portoit à Silviane, et qui previt assez les traverses qu’il en recevroit. Toutesfois, n’y ayant rien de trop difficile pour son amour, il se resolut à tout ce qui luy en pouvoit arriver ; et d’autant que l’ordre de chevalerie qu’il avoit receu, l’obligeoit à ne demeurer plus oisif parmy les dames, il fit dessein de partir pour aller à l’armée, aussi tost qu’il auroit peu prendre congé de Silviane, et n’en point retourner que par quelque acte signalé il n’eust merité cette belle dame. Elle qui jugea qu’il falloit de necessité que cette separation se fist, et qu’ils parvinssent tous deux au contentement qu’ils desiroient par cette voye, luy donna le congé qu’il luy demanda, quoy qu’avec beaucoup de desplaisir ; scachant que le roy avoit cette coutume pour