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que c’est, respondit Silviane, si vous ne valliez pas tant, vos amies pourroient avoir plus long temps le bien de vous voir. - Pleust à Dieu ! dit incontinent Andrimarte, que vous voulussiez estre de ce nombre, et que vous creussiez de me voir, peut-estre quelque bien. - Et pouvez-vous douter, reprit Silviane, que l’un et l’autre ne soit pas ? Vous avez trop de merites, Andrimarte, pour ne donner pas la volonté à ceux qui vous voyent d’estre de vos amis ; et il y a trop long temps que je vous voy pour ne les avoir pas recogneues et estimées. - Madame, respondit-il, j’estimerois ce soir plus heureux que tous les jours de ma vie, si je pensois que la belle Silviane eust quelquefois daigné tourner ses beaux yeux sur mes actions, aussi bien que mon cœur les a ressentis tout puissans, et si à cette heure j’en pouvois avoir quelque asseurance par vos paroles.

La jeune Silviane, ne pensant pas encore que l’amour fust quelque chose qui peust obliger un cœur à se donner entierement à quelqu’un, mais seulement une certaine complaisance, qui nous faict avoir plus agreable la veue et la conversation d’une personne que d’une autre, pensa bien qu’Andrimarte l’aymoit, puis qu’il luy tenoit ces discours, et se considerant en elle-mesme, creut bien aussi d’avoir de l’amour pour luy, mais de l’