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contre Damon. Mais la Nymphe respondit qu’on ne diroit jamais qu’elle eust laissé un si gentil chevalier dans un peril dont elle pensoit estre la cause.

Cependant qu’elles parloient ainsi, elles virent que les leurs qui estoient demeurés à cheval, aussi tost que Damon avoit esloigné le sien, l’estoient venu attaquer, et qu’au premier, le chevalier avoit mis l’épée dans le poitrail jusques à la garde, mais le second, ne perdant point le temps, avoit heurté si rudement Damon, qu’il l’avoit estendu de son long en terre, non pas toutesfois sans vengeance, car il avoit donné au deffaut de la cuirasse de la pointe de l’espée si avant dans le petit ventre du soldurier, qu’il estoit tombé mort à trois ou quatre pas de là. Des six, il n’en restoit plus que trois qui fussent en estat de l’offencer, et tous à pied, mais si opiniastres à finir leur dessein, que deux tout à coup se jetterent sur luy aussi-tost qu’il fut tombé, et quoy qu’il fust d’une extreme force, et qu’il se debatist et fist tout ce qu’il peut pour se relever, si luy estoit-il impossible, ayant ces deux hommes forts et puissans dessus luy. Et sans doute le troisiesme qui s’estoit démeslé de son cheval, eust bien eu le moyen de le tuer, s’il n’eust eu peur de blesser ses compagnons que Damon tenoit embrassez.

Et toutesfois il luy estoit impossible d’eviter la mort, car celuy-cy luy alloit cherchant les deffauts, lors qu’un berger et une bergere arriverent en ce lieu, et le berger voyant l’outrage que tant de personnes faisoient en un seul :