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d’autant que toute contrainte est odieuse, et plus celle qui se trouve en la volonté, que toutes les autres, et telle est l’amour qui jamais ne viendra par les contraintes, ny par l’opinion d’autruy, mais par la seule volonté de celuy qui doit aimer. – Mais, repliqua Calidon ; Astrée est si sage, et si soigneuse de se conserver en cette reputation parmy toutes ses compagnes ! – Ce sont bien tousjours de semblables esprits, dit Hylas, qui font les resolutions les plus entieres. – Je pourrois bien penser, adjousta Calidon, que ce que vous me dites pourroit arriver, si je ne voyois que cette bergere n’est point preoccupée et qu’elle n’ayme personne. – Il est vray, mon amy, respondit Hylas en riant, elle n’ayme personne. – Ny aussi je ne luy ay pas encore rendu assez de service, reprit le berger, et si elle se gaignoit si aisément, elle n’en seroit pas tant estimable. – O Calidon ! s’escria Hylas, et vous aussi vous estes de cette opinion, qu’il faut un long service pour se faire aymer ! Eh ! pauvre berger, que je vous plains, puis que vous en estes reduit à ce poinct ! Vous pouvez de bonne heure faire provision de lunettes pour voir sa beauté en ce temps là, car je ne pense pas que l’aage que vous aurez alors vous permette de la voir sans quelque ayde. N’avez-vous pas ouy dire que Celadon l’a aymée ? – Je l’ay ouy dire sans doute, repliqua Calidon, mais n’estant plus au monde cela ne fait rien contre moy. – Rien contre vous ? dit Hylas. Peut-estre si fait