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quelque ressentiment, lors qu’ils en seroient privez, ils n’auroient jamais qu’un eternel regret de leur perte. – Mais interrompit Diane, si j’y voy bien, ces habits sont ceux d’Astrée, et me semble que ce seroit une grande peine pour cette belle druide de se deshabiller pour prendre ses propres habits. Ne seroit-il point bien à propos qu’Astrée prist ceux de druide, et qu’aujourd’huy elles se laissassent voir ainsi desguisées pour faire passer le temps au sage Adamas, qui sans doute les mécognoistra ou prendra l’une pour l’autre. – Quant à moy, respondit Leonide, je fay bien gageure que la plus grande partie de ceux qui les verront ne les recognoistront pas, pour le moins si l’habit de ma sœur est aussi bien fait pour Astrée que celuy de la bergere l’est pour Alexis.

Alexis mouroit d’envie de posseder tout le jour cet habit, luy semblant que le bon-heur de toucher cette robbe qui souloit estre sur le corps de sa belle maistresse, ne se pouvoit égaler. Astrée qui aymoit passionnément cette feinte druide, et qui desiroit de laisser tout à fait l’habit de bergere pour prendre celuy de druide, afin de pouvoir demeurer le reste de sa vie aupres d’elle, avoit un desir extreme de porter les habits d’Alexis, et toutesfois ny l’une ny l’autre n’osoit en faire semblant, pour ne donner quelque cognoissance de ce qu’elles vouloient cacher. Et parce que Diane les en pressoit. – Mais, ma sœur, respondit Alexis, parlant à Leonide, que dira mon pere s’il me voit vestue de cette sorte ? – Et