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Amour qui fait trouver des contentemens extremes à ceux qui le suivent en des choses que d’autres mespriseroient, representa à cette feinte Alexis un si grand plaisir d’estre dans la robbe qui souloit toucher le corps de sa belle bergere, que ne pouvant la despouiller si tost, elle commença à la baiser et à la presser cherement contre son estomach, et regardant sur la table, elle vit sa coiffure, et le reste de son habit. Transportée alors d’affection, elle les prend et les baise, se les met dessus, et peu à peu s’en accommode, de sorte qu’il n’y eust personne qui ne l’eust prise pour une bergere. Et encore que la robbe d’Astrée luy fust trop estroite, si est-ce que se lacant un peu plus lasche que ne souloit faire la bergere, il y eust eu peu de personnes qui s’en fussent pris garde, mesme que sa beauté et sa blancheur ne dédisans point l’habit qu’elle prenoit, estoient de grandes trompeuses pour la faire croire telle. Estant vestue de ceste sorte, elle s’approche du lict où Astrée reposoit, et se mettant à genoux devant elle, commença de l’idolatrer, et ravie en cette contemplation ; apres y avoir pensé quelque temps, elle profera assez haut ces vers.


Sonnet