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du monde, comme vous disoit ma compagne, si voudrions-nous bien estre telles qu’il vous plaist de nous figurer, parce que la perfection est toujouis desirable en qui que ce soit. – Vous ne devez point, repliqua l’Estrangere, en desirer plus que vous en avez, car vostre desir outrepasseroit la puissance de la nature, ne croyant point qu’elle puisse faire deux différentes beautez plus parfaites. – Et que diriez-vous, madame, interrompit Hylas, qu’encores qu’elles soient telles, je n’en ay jamais esté amoureux, ou c’est si peu que ce n’est rien ? – Je diray respondit Daphnide, qu’il n’appartient pas à tous les oyseaux de se plaire en la pure lumiere du soleil, ny par consequent à vostre mauvaise veue en ces trop grandes beautez. – Tout au contraire, madame, repliqua Hylas, c’est parce qu’il y en a de plus belles en ceste contrée qu’elles ne sont et vous sçavez qu’Hylas ayme sur tout la beauté. – Je croiray difficilement ce que vous dites, respondit l’Estrangere. – Je vous le feray advouer, dit-il, si vous voulez venir où toute ceste trouppe s’en va. – Et afin, discretes bergeres, continua-t’il se tournant vers Astrée, et Diane, que vous ne vous mescontiez, scachez que vous voyez devant vous, sous ces habits de berger et de bergere, la plus belle dame, et le plus gentil chevalier de la Province des Galloligures, et que peut-estre vostre contrée n’eut jamais une plus grande faveur