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m’asseure que le diamant dont celle que ce chevalier raconte a esté blessée, n’estoit qu’un verre, ou quelque pierre falsifiée, et non pas un vray diamant, et par ainsi il n’y avoit pas mis le venin qui est en mes blesseures ; et puis sa playe fut pansée aussi tost qu’elle fut faicte, mais les miennes sont vieilles, et par consequent hors de toute esperance d’estre gueries.

Mais soit ainsi, ô Thamire ! que je puisse la ravoir, ceste beauté méprisée, par la peine que tu y mettras, encore que la chose soit bien douteuse, mais dy-moy, puis que je ne me soucie point, et que ce n’est que pour ta consideration que tu le fais, et pour avoir peut-estre un peu plus de contentement aupres de moy, est-il possible que tu vueilles achepter ton plaisir à mes despens, et encores avec de si chers despens que ceux que tu peux bien prevoir ? En premier lieu, il faut que tu emportes de mon sang, mais ce sang n’est rien, je le donnerois bien tout pour te retenir auprés de moy ; mais que de larmes penses-tu que mes yeux te donneront en ton esloignement ? Que d’ennuys et que de mortelles peines ressentiray-je en ceste separation, et quelle rendras-tu ma vie tant que je ne te verray point ? O dieux ! Thamire, si tu sçavois en quel estat tu mettras ta Celidée, je ne puis penser que tu la voulusses delaisser pour si peu de chose que ceste passagere beauté que tu luy veux aller chercher si loing. Et bien ! Thamire, tu la luy