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rendit si confus, que sans pouvoir parler, il courut embrasser Hermante son cher amy, et apres l’avoir tenu quelque temps en ses bras, se separa de luy pour le reprendre par deux ou trois fois ; en fin reprenant la parole : Est-ce bien, dit-il, mon cher Hermante que je vois, et que je tiens entre mes bras ? Celles que-je vois icy, est-il possible que ce soient les plus belles de la Province des Romains ? Et je dirois de l’univers, si la contrée où nous sommes en estoit dehors. Quoy ! je vois donc la belle et tant admirée Daphnide, la glorieuse Stiliane et cette Carlis, qui la premiere m’apprit à aimer ?

Les dieux m’ont fait trop de grace de vous avoir conduite icy, madame,dit-il, s’addressant à Daphnide, avec vostre compagnie, croyant quant à moy, que c’est pour vous faire estre tesmoing de ma gloire et de ma felicité. – Hylas, respondit incontinent l’Éstrangere, vous n’aurez jamais contentement, où, comme vostre amie, je ne participe ; mais si vous estes estonné de me voir en cet equipage, je ne le suis pas moins de vous avoir rencontré, et deguisé comme vous estes, et en un lieu où je n’avois aucune esperance de vous trouver. Mais comme que ce soit, je tiendray cette rencontre pour tres-heureuse, si elle me fait participer à la gloire et à la felicité que vous possedez. – Madame, interrompit Carlis, il n’a garde de se resjouyr si fort de ma venue, ny de celle de Stiliane. – Et pourquoy, ma premiere maistresse,