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toute la faute, et luy remonstre que si elle continue, elle en donnera cognoissance à toute la Cour, qu’aussi bien la chose estoit faicte, et qu’on n’y pouvoit plus remedier, qu’elle excusast l’amour, qu’elle luy demandast tout ce qu’elle voudroit pour amende de cet outrage. Bref, il luy representa tant de choses, qu’en fin autrée de douleur et de lassitude, elle s’assit sur un siege, tant hors d’elle-mesme, qu’elle ne pouvoit parler. Valentinian s’approche d’elle, se met sur un autre siege, continue ses supplications, et ses remonstrances, et en fin luy declare que son mary n’en sçavoit rien et luy dit de quelle sorte il avoit eu ceste bague.

Voiez, sage Silvandre, quelle vertu eurent ces paroles en ce genereux courage ! L’empereur luy faisoit ceste declaration, afin qu’elle ne le dist pas à Maxime, et pour luy donner quelque consolation, sçachant que le tout estoit ignoré de son mary. Et au, contraire, depuis qu’elle avoit receu cest outrage, le plus grand desplaisir qu’elle eust, c’estoit de penser que son mary y estoit consentant, et ne sçavoit à qui recourre pour estre vengée. Mais quand elle entendit la tromperie que l’on luy avoit faicte, elle en receut une grande satisfaction, esperant d’estre maintenue et d’en pouvoir faire la vengeance. Et afin de le faire mieux à propos, apres avoir demeuré quelque temps sans parler, elle se contraignit de sorte que Valentinian jugea qu’elle estoit un