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qu’il n’a tenu qu’à mon peu d’entendement si je n’ay beaucoup appris. Pour ce sujet je fus envoyé aux escholes des Phocenses Massiliens, où je demeuray jusques à ce que j’eus finy mes estudes. Et parce qu’il y avoit tousjours fort bonne compagnie, lors que nous n’estions point sur nos livres, nous faisions divers exercices. Quelquefois nous assemblant sur le bord de la mer, nous luttions, nous courions, sautions, ou jettions la pierre; d’autresfois quand il faisoit chaud, nous nagions, chassant de ceste sorte le plus que nous pouvions l’oysiveté qui veritablement est la mere des vices.

II advint en esté, lors que les estudes cessent, et que nous estions moins empeschez à nos livres, que nous mettant cinq ou six de compagnie, nous fismes resolution de nous baigner, et pour cet effect sortismes de la ville, et prenant le costé de la Ligurie, allions cherchant la pointe d’un rocher qui s’avançoit en mer, duquel nous avions accoustumé de sauter la teste premiere dans l’eau, et allions bien souvent toucher l’areine de la main, et pour marque en apportions des pongnées sur l’eau. Mais à ce coup, quand nous eusmes monté cest escueil, et que nous commencions de nous desabiller, nous en fusmes empeschez par un tourbillon qui survint, et qui peu apres fust suivy de quelques esclats de tonnerre.