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d’elle, ne destournoit nullement les yeux de dessus son visage. Cependant Leonide et Lycidas se retirans contre une fenestre, continuerent leur discours, mais avant que de les reprendre, Lycidas considerant Alexis : Je ne puis, dit-il, souler mes yeux de regarder la belle fille d’Adamas ; car elle ressemble de telle sorte à mon pauvre frere ; que plus je la considere, et plus j’y trouve des traits, soit au visage, soit en ses façons, où je n’y connois difference que celle des habits. – Y a-t’il long-temps, respondit Leonide, qu’il est mort ? – II y a environ quatre lunes, respondit-il. – Je suis marrie, adjouta Leonide, de ne l’avoir jamais veu, pour avoir ouy dire beaucoup de bien de luy. – Quant à ce qui est de son humeur et de son esprit, dit Lycidas, je ne sçaurois vous le monstrer, mais pour son visage et pour ses actions, regardez Alexis et vous le verrez. Et lors il continuoit : Voilà son mesme œil, sa mesme bouche, sa mesme rondeur de visage. Et par fortune Alexis en mesme temps sousrit de ce que Hylas luy disoit, encor qu’elle n’en eust pas beaucoup d’envie. O dieux ! dit Lycidas, voilà son mesme sousris, et son mesme tourner de teste : fut-il jamais rien de si ressemblant ?

Leonide qui craignoit que cette consideration troc continuée ne luy fist descouvrir qu’Alexis ressembloit si fort à Celadon, que c’estoit Celadon mesme, luy dit : Mais à propos de vostre frere, lors que