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promise, ny mourir aussi sans en tirer vengeance.

Voicy, me dit-elle, continua Silvie, ce que j’ay tousjours le plus redouté : l’imprudence de Leonide, ou plustost sa malice, est si grande qu’elle a declaré à Lindamor l’amitié que je porte à Celadon, et ce rapport est cause qu’il le veut tuer. J’aymerois mieux la mort que si ce berger avoit le moindre mal du monde à mon occasion, et il ne faut point douter que cest outrecuidé ne le fasse pour me desplaire ; et Dieu sçait combien il le pourroit outrager facilement, puis que le pauvre berger n’y pense point, et qu’outre cela il n’a point d’autres armes que sa houlette. Il faut bien dire que c’est une grande malice que la sienne, de pro­curer la mort à celuy qui ne luy fit jamais desplaisir. Je croy que c’est de rage, car elle l’ayme, et voyant qu’il n’a tenu compte d’elle, elle voudroit qu’il fust mort. – Madame, luy respondis-je, je ne croy pas que ma compagne ait fait ceste faute, mais plus­tost une plus grande, car lisant ce que Lindamor luy escrit, je ne pense pas qu’il vueille parler de Celadon, mais de Polemas : car à quelle occasion nommeroit-il Celadon perfide ? – Et pour-quoy, interrompit-elle incontinent, plustost Polemas ? – Parce, madame, luy dis-je, qu’elle luy aura fait sçavoir