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à cette rencontre et à celle du jour precedent, il ne sçavoit s’il en de voit prendre un presage heureux ou malheureux. En fin considerant l’effect de la lettre qu’il avoit remise entre les mains de Silvandre, car il croyoit bien qu’Astrée en avoit sceu quelque chose, il se resolut d’en hazarder une autre, et pour ne perdre temps se depescha de Tescrire, de peur que, s’il tardoit trop, ces bergeres ne s’esveillassent. Il met sur le ply de la lettre, comme il avoit desja fait sur l’autre, et sortant hastivement, s’en va au grand pas où il avoit laissé sa bergere ; mais ayant peur qu’elles ne se fussent esveillées, lors qu’il les approcha, il se couvrit de quelques arbres, et estendant la veue de tous costez, cogneut bien qu’elles ne s’estoient point esveillées. Mais aussi il vit bien que la compagnie estoit plus grande qu’il n’avoit creu au commencement, parce qu’il apperceut un peu loin d’elles les bergers dont nous avons parlé. Et pour sçavoir s’ils dormoient et s’ils estoient de sa connoissance, il s’approcha doucement du lieu où ils estoient, et le premier qu’il rencontra fut Silvandre. Ha ! ridelle amy luy dit-il d’une voix basse ! quelle est l’obligation que je t’ay puis que tu as plus faict pour moy que je ne t’avois osé demander ! Puisses-tu, berger, recevoir de quelqu’un des miens pour remerciemens de ce bien fait quelque