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de me faire jamais voir à elle qu’elle ne me l’ayt commandé. – Et, comment voulez-vous, dit Leonide, qu’elle vous le commande, si eue ne vous voit point, si elle ne sçait où vous estes, voire si elle croit que vous soyez mort ? – Ah ! nymphe, s’escria le berger, qu’Amour est un puissant dieu ! Et tout ainsi que sans raison a bien trouvé le moyen de me bannir de sa presence, de mesme il trouvera bien avec raison le moyen de me rappeller quand il luy plaira. – Vous estes donc resolu, dit Leonide, de ne vous presenter à elle ? – J’eslirois plustost la mort, dit-il, et que toutes mes fortunes soient entre les mains d’Amour. A ce mot, il se leva pour changer de discours, et prenant la nymphe par la main, se vint asseoir au devant de la porte où il avoit roulé quelques gros cailloux. Mais quand elle le vit au jour, elle ne peut retenir ses larmes, le trouvant si changé, dont Çeladon s’appercevant : N’en soyez point affligée, courtoise nymphe. Ce changement, dit-il, que vous voyez en mon visage, n’est qu’une marque d’un prochain repos. Il seroit ennuyeux de raconter par le menu tous leurs discours ; tant y a que quelques persuasions dont elle peut user pour luy faire changer ceste austere façon de vivre, elle ne peut obtenir autre chose de luy, sinon que si