Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/554

Cette page n’a pas encore été corrigée

point à cette heure si elle ayme ou non ? – Il y a plus de danger, luy dis-je, qu’elle ne vous vueille point aymer, qu’il n’est pas à craindre qu’elle en ayme quelque autre. – Quoy que vous me fassiez, dit-il, une fort grande menace, si suis-je plus ayse de l’asseurance que vous me donnez qu’elle n’ayme personne, que je ne suis en peine de la doute que vous avez qu’elle ne me vueille point aymer. – Et pourquoy, luy respondis-je, ne voudriez-vous point avoir un bien si quelque autre y avoit part ? – Pour vous respondre, dit Paris, il faudroit faire une longue distinction des biens ; si vous diray-je briefvement qu’il y en a qui sont d’autant meilleurs qu’ils sont plus communicables, et d’autres d’autant plus à estimer qu’ils se communiquent moins, et en ce : dernier ordre, il faut selon mon opinion, que les biens d’amour soient mis. – Je croy, respondis-je, que si j’estois capable d’aymer, j’en auroy ceste mesme creance, mais que cette peur ne vous diminue point les faveurs que vous en recevrez ; car vous devez estre tres-asseuré que celles qu’elle vous fera (si toutesfois ce bien vous arrive) pour certain ne seront point communes.

Or, Celadon, je vous ay faict tout ce discours par le menu, à fin que vous jugiez de quelle sorte Paris est vivement attaint ; maintenant je vous diray quelque chose de Silvandre et de Lycidas. Descendant