pour estre tous atteints de ce mal d’esprit qui, sur tous les autres est ennemy du sommeil. Car Tircis mesme aimoit encore sa Cleon morte, quoy qu’il n’eust plus d’esperance de la revoir ; et parce qu’entre tous il n’y en avoit point qui fust plus libre que l’inconstant Hylas, c’estoit aussi celuy qui portoit avec moins d’incommodité son amour. Et de fortune Tircis ayant la pensée en sa chere Cleon, ne peut s’empescher de souspirer fort haut, et en mesme temps Silvandre en fit de mesme. Voilà, dit Haylas, deux souspirs bien differents. – Et comment l’entendez-vous ? Dit Paris. – Je l’entens ainsi, et m’imagine que Silvandre souffle de ceste sorte pour estaindre le feu qui le brusle, et Tircis, pour r’allumer celuy qui l’a bruslé autresfois. – Haylas parle fort bien, dit Tircis quand il dit qu’ils s’imagine telle chose, car aussi n’est ce qu’une pure imagination d’une ame qui ne sçait pas aymer. – Et vous aussi, Tircis, respondit Hylas me reprochez que je ne sçay pas aymer ? Je pensois qu’il n’y eust ce fantastique Silvandre qui deust avoir cette opinion. – Si chacun, dit Tircis, jugeoit avec la raison, vous mesme le croiriez comme nous. – Comment dit Hylas, se relevant sur un coude, que pour bien aymer, il faut idolatrer une morte comme vous ? – Si vous sçaviez bien aymer, adjousta Tircis, il n’y a point de doute que si vous aviez une rencontre aussi malheureuse
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